Bertram Wooster, dit Bertie, est un jeune aristocrate qui n'a pas inventé le fil à couper le beurre. Maladroit avec les femmes, capable de chanter les pires chansons de marins, il passe le plus clair de son temps dans son club pour gentlemen où lui et ses semblables s'étourdissent de bêtise pour échapper au peu de responsabilités que leur statut impose. Ils chantent, boivent et font des paris stupides sans trop se soucier du lendemain. La fortune familiale est là, à la fois rassurante et écrasante, le but du jeu est de retarder au maximum les affres d'un mariage arrangé qui viendra mettre fin à cette vie de bamboche. Et Bertie est de ceux-là : couard, benêt et sans un sou de jugeotte. Mais adorable dans sa niaiserie.
La grande chance de Wooster, c'est son majordome : Jeeves. Finement éduqué, véritable incarnation du flegme britanique, il a réponse à tout et dirige subtilement la destinée de son maître. Engoncé dans sa tenue amidonée, Jeeves sait. Le nom de cette jeune fille ? Il l'a appris en discutant avec la dame de chambre de la demoiselle. Qui est l'héritier de telle maison ? Il a justement travaillé pour ce lord il y a quelques années. Comment faire partir une tâche de tomate sur une tenue de golf ? Il concocte une mixture dont il a le secret qui fera des miracles… Jeeves est impassible. Sans jamais dire non, il n'en fait qu'à sa tête et manipule un Bertie trop heureux de laisser un autre prendre les décisions. Ce n'est pas pour rien si la série se nomme Jeeves & Wooster et non Wooster & Jeeves.
Chaque épisode raconte une aventure oscillant entre le pittoresque et le pathétique où Bertie :
- essaye d'échapper aux manœuvres matrimoniales de sa vieille tante qui veut absolument le caser avec une fille de bonne famille
- profite d'une kermesse de province servant de levée de fonds pour rénover l'église du coin pour organiser des paris clandestins
- aide un bon copain amoureux à faie une cour hasardeuse à la fille d'un châtelain
…
Les plans de Bertie tomberont invariablement à l'eau, et Jeeves, d'une remarque à double sens et d'une astucieuse stratégie, démontrera que la classe et la distinction ne viennent pas nécessairement avec un titre de noblesse.
Wooster le looser est incarné par un Hugh Laurie superbe de maladresse tandis que Stephen Fry fait un splendide Jeeves d'une remarquable efficacité. Ce duo-là est irresistible de contradiction (la cohabitation des opposés étant la base de la comédie), s'amusant à singer cette époque qui pétait plus haut que son cul. Les décors sont viellots, les voitures sentent la naphtaline, les tenues de golf dégueulent de beige et de marron… On est vraiment dans l'ambiance des séries historiques diffusées sur France 3. Et Hugh Laurie en profite parfois pour jouer du piano tout en chantant une odieuse chanson populaire alors que Jeeves fait briller les souliers de son maître d'un coup de torchon précis.
Les épisodes de 55 minutes sont parfois un peu longuets (ils ont été tournés au début des années 90, le rythme n'était pas le même), mais il y a dans cette série un charme fou. La série est adaptée de 35 nouvelles et 11 romans signés par P.G. Wodehouse.
Laurie et Fry sont décidément des gens bourrés de talent...
Très heureux que tu vantes cette excellente série.
RépondreSupprimerJe comprends mieux ton personnage à l'Appel de Cthulhu, maintenant.
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