- C'est quoi déjà ton nom, gamin ?
- Ashok Kumar Banker.
- Ah ouais, quand même... T'es certain de ne pas vouloir prendre un pseudonyme ? C'est pas que ça améliora forcément tes ventes, mais au moins ça ne les freinera pas.
- Non, Monsieur Bob, je préfère garder le nom que mes parents m'ont donné.
- Je comprends ça, petit, moi aussi j'ai mis du temps avant de me faire appeler Bob, tu sais. Allez, fais moi plaisir, on met Ashok K. Banker, en virant le Kumar, ça fera moins... tu vois ce que je veux dire...
- Non, pas trop.
- Ouais, ben revenons-en à ton bouquin, là, Le Prince d'Ayodiâ. C'est pas mal pour un premier jet. Bon, je ne dis pas qu'il n'y a pas un ou deux petits trucs à modifier, mais t'as de l'imagination, mon gars, ça se laisse lire. Je ne sais pas où tu es allé nous chercher cette histoire de prince Râma qui part tout seul se battre contre une armée d'un million de démons, mais ça fonctionne.
- Il s'agit d'un conte myth...
- Ouais, ouais, je comprends. Je ne te cache pas que j'ai été un peu surpris au début, vu que ton héros est directement prince, c'est même pas un petit paysan qui se rend compte que son vrai père est un roi et qu'il a une destinée. Ceci dit, tu lui donnes plein de pouvoirs magiques dès le départ, ça nous change des quêtes initiatiques où le héros se rend compte à la fin que le plus important c'est pas la destination, mais le voyage, et gnagnagnagna. Là, c'est bien, ton Râma est super fort, ça fait plaisir de lire un truc décomplexé. Mais j'ai un méchant problème avec toi, bonhomme. Mon assistante a compté le nombre de mots que tu as mis dans ton glossaire à la fin : 269 définitions. C'est beaucoup trop, je ne peux pas décemment te laisser faire ça, c'est un suicide littéraire. Le lecteur, ce qu'il veut, c'est un truc accessible à lire dans le métro ou aux toilettes, il ne veut pas une thèse d'anthropologie. Les gens ne sont pas bêtes, ils savent bien que tu inventes tes histoires, alors pas la peine d'inventer des mots imprononçables comme kalârappa ou pradhan-mantri.
- Oui, mais dans mon pays...
- Un autre exemple : tes démons, ils sont pas mal, bien costauds comme il faut, ça gicle bien pendant les combats. Mention spéciale à la démone qui mesure 300 mètres de haut : enfin des méchants qui en imposent. Mais quel besoin tu as de les appeler de 23 manières différentes et de dire que celui là est le fils de tel dieu ou que l'autre est le cousin germain de telle déesse ? T'embête pas avec ça, le lecteur ne fera même pas attention à ces détails. D'ailleurs, au passage, vas-y mollo avec tes dieux exotiques. Une vache sacrée ? C'est pas un peu trop ? Pareil, ton dieu avec une tête d'éléphant, je trouve ça trop... segmentant. Il te faut un truc rassembleur, coco, cherche pas absolument à réinventer l'eau chaude. D'ailleurs, fais gaffe : t'as appelé ta déesse maléfique Kali : ça va se voir que tu as piqué cette idée dans un Indiana Jones, j'ai pas envie que l'avocat de Spielberg t'assigne au tribunal pour plagiat. Mais sinon, j'aime bien, c'est exotique. On sent bien que tu improvises au fur et à mesure et que tu ne sais pas trop où tu t'en vas dans ton histoire, mais c'est charmant. Les lecteurs aiment bien, la fraîcheur, de temps en temps. T'as un idée sur combien de volumes tu pourrais nous délayer la sauce ?
- Mon Râmâyana aura 6 tomes au final, Monsieur Bob.
- 6 ? Oh mais c'est génial ! Mais va falloir me mettre plus de scènes osées dans la suite. Ton roi a trois épouses officielles, des concubines à la pelle, me dis pas que tu ne pas me glisser quelques trucs salaces pour pimenter les volumes suivants. Et fais pas dans l'évocation comme dans le premier volume ; sois explicite. Exit les trucs poétiques façon "Sa fleur de lotus s'ouvrit lentement". Par contre, j'ai adoré le coup de la prophétie dès la première ligne du premier chapitre. Bang, direct. Et puis, je vais te dire : que ça ne te monte pas à la tête, mais tu sais y faire avec la magie. Enfin quelqu'un qui a compris qu'il faut de la surenchère. Tes prophètes y vont franco avec leurs trucs brahma-machin-chose, ça dépote. Et vas-y que je jette des sorts qui ciblent toute une foule... Zou, je te dégomme un démon de 6 mètres de haut en une seule attaque. J'imagine déjà comment ça va être énorme quand Râma va finir par affronter le roi des démons dans le dernier volume. Bon, à part ça, pour les droits d'auteur, j'ai une bonne nouvelle, je vais pouvoir te payer directement en roupies...
Pour un autre avis que celui de Bob, lire cette critique sur Noosfere qui résume parfaitement ma réserve enthousiaste vis-à-vis de ce roman.
- Ashok Kumar Banker.
- Ah ouais, quand même... T'es certain de ne pas vouloir prendre un pseudonyme ? C'est pas que ça améliora forcément tes ventes, mais au moins ça ne les freinera pas.
- Non, Monsieur Bob, je préfère garder le nom que mes parents m'ont donné.
- Je comprends ça, petit, moi aussi j'ai mis du temps avant de me faire appeler Bob, tu sais. Allez, fais moi plaisir, on met Ashok K. Banker, en virant le Kumar, ça fera moins... tu vois ce que je veux dire...
- Non, pas trop.
- Ouais, ben revenons-en à ton bouquin, là, Le Prince d'Ayodiâ. C'est pas mal pour un premier jet. Bon, je ne dis pas qu'il n'y a pas un ou deux petits trucs à modifier, mais t'as de l'imagination, mon gars, ça se laisse lire. Je ne sais pas où tu es allé nous chercher cette histoire de prince Râma qui part tout seul se battre contre une armée d'un million de démons, mais ça fonctionne.
- Il s'agit d'un conte myth...
- Ouais, ouais, je comprends. Je ne te cache pas que j'ai été un peu surpris au début, vu que ton héros est directement prince, c'est même pas un petit paysan qui se rend compte que son vrai père est un roi et qu'il a une destinée. Ceci dit, tu lui donnes plein de pouvoirs magiques dès le départ, ça nous change des quêtes initiatiques où le héros se rend compte à la fin que le plus important c'est pas la destination, mais le voyage, et gnagnagnagna. Là, c'est bien, ton Râma est super fort, ça fait plaisir de lire un truc décomplexé. Mais j'ai un méchant problème avec toi, bonhomme. Mon assistante a compté le nombre de mots que tu as mis dans ton glossaire à la fin : 269 définitions. C'est beaucoup trop, je ne peux pas décemment te laisser faire ça, c'est un suicide littéraire. Le lecteur, ce qu'il veut, c'est un truc accessible à lire dans le métro ou aux toilettes, il ne veut pas une thèse d'anthropologie. Les gens ne sont pas bêtes, ils savent bien que tu inventes tes histoires, alors pas la peine d'inventer des mots imprononçables comme kalârappa ou pradhan-mantri.
- Oui, mais dans mon pays...
- Un autre exemple : tes démons, ils sont pas mal, bien costauds comme il faut, ça gicle bien pendant les combats. Mention spéciale à la démone qui mesure 300 mètres de haut : enfin des méchants qui en imposent. Mais quel besoin tu as de les appeler de 23 manières différentes et de dire que celui là est le fils de tel dieu ou que l'autre est le cousin germain de telle déesse ? T'embête pas avec ça, le lecteur ne fera même pas attention à ces détails. D'ailleurs, au passage, vas-y mollo avec tes dieux exotiques. Une vache sacrée ? C'est pas un peu trop ? Pareil, ton dieu avec une tête d'éléphant, je trouve ça trop... segmentant. Il te faut un truc rassembleur, coco, cherche pas absolument à réinventer l'eau chaude. D'ailleurs, fais gaffe : t'as appelé ta déesse maléfique Kali : ça va se voir que tu as piqué cette idée dans un Indiana Jones, j'ai pas envie que l'avocat de Spielberg t'assigne au tribunal pour plagiat. Mais sinon, j'aime bien, c'est exotique. On sent bien que tu improvises au fur et à mesure et que tu ne sais pas trop où tu t'en vas dans ton histoire, mais c'est charmant. Les lecteurs aiment bien, la fraîcheur, de temps en temps. T'as un idée sur combien de volumes tu pourrais nous délayer la sauce ?
- Mon Râmâyana aura 6 tomes au final, Monsieur Bob.
- 6 ? Oh mais c'est génial ! Mais va falloir me mettre plus de scènes osées dans la suite. Ton roi a trois épouses officielles, des concubines à la pelle, me dis pas que tu ne pas me glisser quelques trucs salaces pour pimenter les volumes suivants. Et fais pas dans l'évocation comme dans le premier volume ; sois explicite. Exit les trucs poétiques façon "Sa fleur de lotus s'ouvrit lentement". Par contre, j'ai adoré le coup de la prophétie dès la première ligne du premier chapitre. Bang, direct. Et puis, je vais te dire : que ça ne te monte pas à la tête, mais tu sais y faire avec la magie. Enfin quelqu'un qui a compris qu'il faut de la surenchère. Tes prophètes y vont franco avec leurs trucs brahma-machin-chose, ça dépote. Et vas-y que je jette des sorts qui ciblent toute une foule... Zou, je te dégomme un démon de 6 mètres de haut en une seule attaque. J'imagine déjà comment ça va être énorme quand Râma va finir par affronter le roi des démons dans le dernier volume. Bon, à part ça, pour les droits d'auteur, j'ai une bonne nouvelle, je vais pouvoir te payer directement en roupies...
Pour un autre avis que celui de Bob, lire cette critique sur Noosfere qui résume parfaitement ma réserve enthousiaste vis-à-vis de ce roman.
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Bien très bien, ça m'a donné envie de lire...
RépondreSupprimer...Seigneur de Lumière de Zelazny.
Vous n'êtes pas obligés de lire tout ce que publie Bob.
RépondreSupprimerce qu'est terrible avec Bob, c'est qu'au final je n'arrive pas à savoir si Cédric a aimé le bouquin ou pas....
RépondreSupprimerCédric parle dans son billet de "réserve enthousiaste"...
RépondreSupprimerah mais oui, forcément si c'est écrit en tout petit à la fin du poste (quoi moi de mauvaise fois.... non pas du tous pas du tous)
RépondreSupprimerc'était donc Cédric Jeanneret en direct du compte de sa femme...
RépondreSupprimerOh zut. Moi qui me réjoissais d'avoir une nouvelle signature (féminine en plus !) dans les commentaires... :)
RépondreSupprimerJe suis super emmerdé avec le Râmâyan de Banker. D'un côté c'est génial pour goûter à la mythologie sauce curry, c'est quand même une histoire ancestrale qui dépote. Mais bon, c'est mythologique, alors il faut aimer les héros façon Dragon Ball Z qui méditent un coup, ouvrent un ou deux chakras et maîtrisent tout à coup le burmavidâ parakchakâ de la déesse Visnidâ qui leur permet de décocher des flèches aussi vite qu'un colibri bat des ailes.
RépondreSupprimerLes méchants sont méchants, les gentils ont un coeur en or, les vieux sages une barbe blanche et des pouvoirs de bourrins. Bref, c'est trop... et pourtant, tu lis une histoire ancienne, tu te dis quand même que c'est une part importante de leur culture, tu ne peux pas que lire l'histoire en la comparant à la production fantasy habituelle. Mais le bandeau sur la couverture qui t'annonce "Fantasy" te démontre pourtant que c'est bien de la fantasy moderne.
Bref, ni pour ni contre, bien au contraire.
Cédric Jeanneret
RépondreSupprimerBen moi je trouve que l'avis de Cédric transparait assez clairement dans l'entretien quand même. Il faut savoir lire entre les lignes du script de Bob. Sinon pour les entretiens de Bob, je pensais qu'on se lasserait de l'idée mais en fait la sauce continue toujours de prendre! On en redemande!
(c'est Amra)
RépondreSupprimerLes adaptations du Râmâyana sont à la mode mais ce bouquin m'a vite lassé. J'ai préféré la version comic futuriste ou le dessin animé musical et complètement déjanté de Nina Paley.
Et seigneur de lumière, malgré ses 40 ans, n'a pas pris une ride. Je l'ai lu il y a peu, j'ai été soufflé.
Merci Amra pour le lien vers Sita sings the blues, c'est effectivement bien déjanté comme approche, mais j'aime beaucoup.
RépondreSupprimerSi Bob est emballé, je passe mon tour...
RépondreSupprimerJe remarque que Bob lit quand même le tome 2 (Cédric lit...).
RépondreSupprimerCédric a acheté les trois livres en VF à pas cher chez un bouquiniste, et Cédric est du genre à se sentir coupable s'il ne lit pas ce qu'il a acheté. Alors Cédric va encore avaler 900 pages de super héros made in bollywood car il est maso.
RépondreSupprimerSérieux, je suis très curieux de ce qu'aurait pu être Kali Yuga, le JdR de Pierre Pradal. Ça donne des idées pour Scion, ce genre de lecture.
Bon, après 150 pages du volume 2, l'ennui l'a emporté sur la culpabilité. Je ne supporte plus les guru qui méditent 250 ans, les super héros qui hésitent entre leur karma et leur dharma, les démons super forts qui se font torchés en deux secondes... Sur le premier volume, j'étais emporté par la nouveauté, mais l'idée de lire 6 tomes du même acabit, je craque. Bob m'a tuer.
RépondreSupprimerCédric, j'ai été comme toi, du genre à me sentir coupable, ou quelque chose d'approchant, si je ne terminais pas un livre. Je le suis de moins en moins. Voire, plus du tout. Il n'est qu'à voir mes chroniques de livres inachevés dont la liste s'allonge, s'allonge. Mon credo dorénavant : la lecture est un plaisir, halte à l'ennui ! Bienvenu au club.
RépondreSupprimermoi j'aime ca mais le tome 4 est pas encore sorti
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