Vous l'ignorez sans doute, mais je suis une sorte de sommité en ce qui concerne le front du Pacifique durant la seconde guerre mondiale. C'est bien simple, j'ai vu presque tous les épisodes des Têtes brûlées quand j'étais gamin et je me suis assoupi pendant Les lettres d'Iwo Jima de Clint Eastwood. Alors quand HBO a annoncé une série de 10 épisodes nommée The Pacific, j'ai attendu cette production avec le regard acéré du critique pointilleux pour qui Pacifique, c'est avant tout Quand tu sers mon corps.
C'est vrai que le front du Pacifique n'est pas particulièrement parlant pour les Européens que nous sommes. Nous avons été nourris du jour j, de la ligne de démarcation et de la ligne Maginot. Les enjeux d'un océan lointain et la ténacité japonaise ne coulent pas de source pour nous. Ça manque de proximité. Nos arrières-grands-pères ne sont pas morts à Guadalcanal, du coup nous ne nous sentons pas nécessairement concernées par cette phase du conflit mondial. Personnellement, j'ai toujours eu du mal à lier le nazisme et l'empire japonais : ce sont à mes yeux deux guerres différentes. Mon esprit a même du mal à croire qu'elles se sont déroulées au même moment.
Et pour être honnête, je suis mitigé avec The Pacific. Non pas que la série soit une ignoble apologie de la guerre et du courage américain. C'est même étonnant comme cette série est emprunte de réalisme. Les soldats ne sont pas magnifiques, ils puent et crèvent la gueule ouverte. Les rares actions d'éclat ne sont pas des resucées des films de western avec John Wayne. Bon, les ralentis de la caméra avec la petite musique larmoyante pour les moments poignants sont de rigueur, mais sinon c'est crade comme il faut. Le hic, c'est que depuis qu'ils ont sauvé le soldat Ryan et que les petits gars de la compagnie Easy sont allés jusque dans le nid d'aigle, je dois avouer que j'ai eu mon comptant de scènes de guerre réalistes. Il y a une limite au nombre de plans sur lequel un soldat explose en petits morceaux que je peux supporter sans rechigner. J'ai assisté à assez de débarquements sanguinolents avec caméra sur l'épaule pour toute une vie. Des mecs qui perdent un bras ou une jambe en gros plan, j'en fais une overdose, même.
Alors je suis dans une situation paradoxale où les scènes de guerre sont ce que j'aime le moins dans les films de guerre (oui, j'aime MASH). C'est la vie quotidienne du soldat qui me branche, pas la tuerie frénétique avec la boue qui gicle sur la caméra. The Pacific m'a intéressé car justement, elle met en scène certains aspects de la vie hors combat. Les soins à l'arrière. Les héros que l'on invente pour faire avaler la propagande. La logistique au quotidien. Mais la moitié du temps, j'ai eu droit à du tac-à-tac-à-tac de base, des explosions et des tripes en vrac. C'est bien simple, moi, dans Full Metal Jacket, je trouve que la partie qui est la moins réussie, c'est quand les personnages partent sur le front. Je n'ai pas besoin que l'on me montre le sang et la fumée pour saisir l'ignominie. C'est un peu comme dans un film d'horreur : tant que je ne vois pas la créature et que je dois faire travailler mon imagination, je flippe. Dès que l'on me montre le monstre, le charme est rompu.
En fait, l'épisode que j'ai préféré est celui où les personnages sont en permission à Melbourne. Pas de combat mais de l'humain fatigué qui essaye de se reconnecter avec la normalité malgré le fossé culturel entre américains et australiens.
Autre truc qui m'a agacé : la narration est divisée entre trois personnages. Et le fait de passer d'un point de vue à l'autre m'a le plus souvent sorti du récit plutôt que de participer à l'immersion. Dans Band of brothers, le fait de suivre une unité faisait en sorte que l'on s'attachait aux soldats. Là, c'est bien plus superficiel comme rapprochement humain. On papillonne et du coup ça reste distant comme lien.
Donc, si vous avez été clients de Band of brothers, The Pacific vous comblera très certainement. Moi, quitte à regarder le massacre de Guadalcanal, je préfère la vision plus introspective et moins grandiloquente de La ligne rouge.
Les Têtes brulées sonr adaptées en BD. Le premier tome est sorti récemment : http://boyington.blogspace.fr/r28181/LES-TETES-BRULEES-EN-BD/
RépondreSupprimerD'ailleurs c'est marrant ya plein de BD d'avion maintenant, ça va presque devenir un genre à part entière.
La chanson, là, tu la sors d'où 'grin' ?
Boyington ? Je viens d'acheter son autobiographie suite à ma lecture de Rosée de Feu. Mauméjean indiquant que cette dernière portait en grande partie sur ses vingt mois de captivité au Japon.
RépondreSupprimerSinon je réussis le grand écart d'aimer toutes les références (enfin seulement le premier quart d'heure pour le Soldat Ryan) que tu as cités...
Je tenterais donc ma chance avec The Pacific quand il débarquera.
La BD sur les Têtes brûlées me fait beaucoup penser au Buck Danny de mon enfance (et ce n'est pas un compliment).
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