Ray Dreker a incarné le rêve américain. Athlète émérite, il accède au statut divin de sportif professionnel, mais se blesse pour finir par devenir biclassé entraîneur de basket/professeur d'histoire dans son lycée d'adolescence. Marié à son premier amour, ils ont deux enfants, des faux jumeaux. Et puis à 40 ans, tout explose en vol. Sa femme s'est barrée avec un dermotalogue, les jumeaux deviennent des goths, sa maison prend feu… Ray a besoin de redresser la barre, de changer de vie. Pour cela, il lui faut de l'argent. Mais il vit à Détroit pendant la crise économique. C'est peine perdue : il est condamné à survire petitement. Sauf que. Ray prend conscience que son plus gros atout dans la vie se trouve entre ses jambes. En effet, Ray est bien équipé. Or ses parents lui ont enseigné la valeur du travail et de l'acharnement. Il va donc se prostituer.
Comme souvent, sous le prétexte de traiter d'un sujet bien précis, cette série télévisée aborde des questions bien plus larges que le pitch étroit. La prostitution est bien évidemment la clef de voute de la narration, et c'est vrai que c'est l'occasion de scènes tantôt cocasses, tantôt malaisantes. L'apprentissage de cette nouvelle profession est l'occasion de confronter le spectacteur à plusieurs tabous, c'est très bien amené. Est-ce un reflet exact de la prostitution : absolument pas. Ray est gigolo, il ne traîne pas dans les rues sordides, ne se fait pas emmerder par les flics, ne se fait pas casser la gueule par d'autres maquereaux. Mais c'est également une série sur un homme qui veut redresser sa vie (avec l'allégorie de la maison à reconstruire), sur la vie des familles recomposées, la stupidité des gourous de la motivation et de la réussite…. Et surtout, sur la petite apocalypse économique que subit Détroit. C'est le chômage, les maisons en ruine, la petite mort des services essentiels…
Alors oui, inutile d'aller vous plaindre à Familles de France, il arrive que ça baise dans cette série. Hung est toutefois moins putassière que certaines séries se voulant plus familiales. Oh, Ray passe à l'acte, des fois en gros plan, mais vous le verrez plus souvent se prendre la tête avec sa maquerelle poétesse (car oui, il faut savoir s'entourrer pour faire ce métier), son ex-femme elle aussi en crise et son voisin qu'en train de suer du nombril. La série sait traiter des petits détails (quel prix pour une prestation ? Quelle clientèle démarcher ? Comment concilier ça avec le travail, la vie de famille ?) pour donner du corps à l'ensemble. Et comme les épisodes sont courts (22 minutes), les intrigues ne s'éternisent pas ni n'abusent du faux suspens avant chaque pause publicitaire.
Hung (que l'on peut traduire grosso modo par "Bien monté") possède au final bien plus de finesse qu'on pourrait le croire de prime abord. Elle sait être ne pas être racoleuse, ce qui est un comble pour une série sur la prostitution de luxe. Pas étonnant que cela soit une production HBO.
Clairement j'ai accroché à cette série, alors que pourtant le thème ne me parle pas du tout à la base. Mais c'est bien amené, parfois marrant, pas lassant pour un sou, et il y a même un petit quelque chose qui fait que le tout semble relativement réaliste - je doute évidemment que le personnage présenté, et sa situation, soit monnaie courante, mais la série ne tombe finalement jamais dans l'excès ou la caricature, et au final, c'est de fait franchement regardable et accrocheur.
RépondreSupprimerEncore une bonne série HBO, décidément! Je suis dans The Wire en ce moment, mais je note pour plus tard.
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