Shenzhen & Pyongyang


Après Les Chroniques de Jérusalem, j'ai décidé de lire les expériences précédentes de Guy Delisle tandis qu'il supervise des équipes d'animation respectivement en Chine et en Corée du nord. Dans les deux cas, il débarque et travaille 2 à 3 mois avec des dessinateurs avec qui il ne peut pas communiquer sans le truchement d'un traducteur. Si Shenzhen est simplement une ville triste et grise, Pyongyang est bien évidemment une endroit kafkaïen (mais cet adjectif est tellement galvaudé) où le choc n'est pas tant culturel que moral. Delisle ne dévoile rien que nous ne sachions pas déjà sur les totalitarismes qui prétendent offrir l'utopie communiste pour les masses, mais cette expérience humaine et directe permet de remarquer les petits détails de la vie de tous les jours. Dont une superbe allégorie d'un pont rouillé qui est à moitié peint en trois jours par des "volontaires" avant que les travaux ne cessent, faute de peinture, et que la rouille reprenne le dessus.

Deux ailleurs très différents, donc : une Chine qui se construit trop vite et une Corée du nord enfermée dans une boule à neige délétère. Et un canado-français qui essaye de faire son travail de superviseur tandis que la qualité des dessins sous-traités à ces studios est en dessous de tout. Des problèmes élémentaires d'anatomie ou d'animation qui montrent qu'un artisanat vivace est désormais délocalisé sans vergogne. Bâclés, ces dessins made in China prouvent que le dessin animé est devenu un produit comme un autre sur lequel il est possible de faire des économies d'échelle en abaissant les standards de production.

Deux très belles tranches de vie qui confirment que Guy Delisle n'aime pas les séjours confortables mais qu'il  a le don pour raconter ses expériences de mercenaire du dessin.


Commentaires

  1. Kobal m'avait prêté Shenzhen et je l'avais lu avec intérêt mais j'en étais ressorti déçu : le type voyage en Chine et passe son temps libre dans sa chambre d'hôtel. Il n'apprend pas la langue locale mais semble plutôt vivre une peine de prison. C'est triste quand même !

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    1. Alors imagine l'enfermement à Pyongyang. Il ne peut pas sortir sans un guide. Et y'a rien à voir, si ce n'est une ville sans électricité. Mais le pays est tellement schizo que c'est fascinant de folie.

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  2. Shenzhen est un peu une chronique de l'ennui, alors ce n'est pas passionnant. Mais apprendre le chinois en si peu de temps est très difficile.
    Par contre Pyongyang est à la fois marrant et instructif, et au final tout à fait passionnant. Et graphiquement, l'auteur a progressé.

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  3. Si tu as aimé ça, plonges toi dans Joe Sacco. Son Gorazde est une perle, ainsi que son Gaza 1956. J'ai évoqué les deux dans mon blog.

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