Très
vite lu, ce petit bouquin de 130 pages et des poussières fait le tour d’un tas
de… poussières, justement. Reliquats oubliés de l’empire colonial, confettis
d’Europe rattachés à la France pour de lointaines raisons historiques, îles
fantômes qui ont sombré ou n’ont jamais existé, il y en a pour tous les
goûts !
À
titre personnel, ma préférée reste l’île Julia, gros caillou volcanique qui
apparaît et disparaît de temps à autre au centre de la Méditerranée. Elle fut
solennellement annexée par la France dans les années 1830, quelques semaines
avant qu’elle ne sombre sous le nez des Anglais qui venaient l’ajouter aux
domaines de Sa Gracieuse Majesté. Abondamment cité, le compte rendu donné par
les braves scientifiques qui y ont déployé le drapeau tricolore oscille entre
Jules Verne, Lovecraft et Courteline.
La
corbeille de mariée contient aussi un bout des Galapagos revendiqué par un
village basque, une part d’Antarctique presque aussi grande que la métropole,
les quelques hectares du domaine de l’Empereur à Sainte-Hélène, une poignée d’îles
à naufragés plus ou moins épouvantables, sans oublier une collection de rochers
épars aux quatre coins des sept mers (doit-on dire « aux sept coins »,
dans ce cas ?) Certains relèvent sans doute de l’erreur de navigation,
voire du canular. D’autres, comme l’île des Démons, quelque part entre Islande
et Canada, sont attestées au XVIe siècle, ont laissé des traces
littéraires, mais ne se montrent plus. Pourquoi ? Allez savoir…
Notons,
soit dit en passant, la modernité n’entame qu’assez peu le brouillard dans
lequel baigne une bonne partie de ces domaines. Certains de ces braves cailloux
jouissent d’un microclimat assez pourri pour être impossibles à cartographier
par satellite, d’autres apparaissent sur des applications de géolocalisation
alors qu’ils n’existent pas, à moins que ce ne soit le contraire… C’est
toujours bon de voir qu’il reste des espaces d’incertitude dans ce monde
panoptique !
L’histoire
de tous ces bidules remet l’épopée à la portée des imbéciles : vite,
saoulons l’Anglais qui veut s’emparer de l’archipel Machin et hâtons-nous de
prendre la mer pendant son sommeil, qu’il nous trouve sur place ! Au
passage, on entrevoit une face étrange de la IIIe République,
annexant des îles désertes pour y envoyer des collecteurs d’impôts, ou changeant
par décret d’honnêtes entrepreneurs en maharadjahs…
Et
bien sûr, on visite Clipperton, l’îlot qui a failli nous valoir une guerre avec
le Mexique, dont l’auteur donne obligeamment le code postal tout en signalant
qu’il n’existe ni habitants pour recevoir de courrier, ni boîtes aux lettres.
Certains
sujets auraient mérité d’être creusés, comme celui des deux mille et quelques
cimetières militaires français à l’étranger. Mis bout à bout, ils doivent
représenter une sacrée surface ! Hélas, ce tour du monde se fait au pas de
course, c’est son principal défaut.
En
prime, la jaquette se déplie pour former une jolie carte pleine d’animaux
improbable et de petits drapeaux français plantés sur des îles
surdimensionnées.
(Éditions
du Trésor, 17 euros)
Elle est comme ça, la France. Éternelle. Elle porte loin.
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