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Je ne
raffole pas des sagas familiales, mais alors vraiment pas. La faute à la
famille Ewings et à tout le soap opera que j’ai ingurgité malgré moi au cours
de mon enfance. Parce qu’on n’avait pas HBO et Netflix, nous, on se cognait Côte Ouest. Une chance, ça ne se binge
watchait pas, ça se savourait un épisode à la fois. Rien qu’à l’idée d’imaginer
mon arrière-grand-mère un peu sénile ayant accès immédiat à une quantité
presque illimitée d’épisodes de Santa Barbara, j’en ai des frissons. Tout ça
pour dire que la saga familiale, non merci. Et pourtant…
Patricia
est une jeune institutrice britannique bien comme il faut. Elle aime la
littérature, les belles idées, les oiseaux, Dieu et tout le tralala. Quand
Mark, un étudiant en philosophie bien comme il faut lui écrit des lettres d’amour
enflammées et lui propose le mariage, elle hésite. De cette tergiversation vont
naitre deux lignes temporelles différents : une où elle se marie à Mark et
se fait appeler Pat, une où elle dit non et se fait appeler Trish. Il ne me
revient pas de vous lister les différences entre ces deux parcours de vie, mais
malgré des écarts évidents, ces deux vies potentielles vont entrer en résonance
sur certains points. Elle aura des gamins dans ces deux vies, mais lesquels
sont les vrais, lesquels appartiennent à la ligne de vie fantasmée ?
Ce n’est
pas de la SF à grand déploiement. On y colonise bien la Lune, on s’y bat
parfois à coup de bombes nucléaires, on s’y uchronise subtilement, mais ce n’est
pas le cœur du livre. C’est la coexistence de deux vies tout aussi légitimes l’une
que l’autre. Des petits plaisirs, de grandes espérances, des malheurs… Patricia
est superbement rendue. On y croit à chaque page. On s’amuse, on pleure, on
rit, mais il n’y a pas de méchant ou de gentil. Comme dit le poète :
Des
vies, que des vies, pas les mieux, pas les pires
Des
bas, des hauts, des cris, des sanglots, des feux, des désirs
Du
temps qu'on aura cru saisir
Mais
que restait-il à écrire ?
Des
vies où l'on aura eu peu, si peu à choisir
Je m’étais
déjà fait avoir par Jo Walton avec Morwenna où elle m’avait
intéressé, contre mon gré, à la vie d’une adolescente prisonnière d’un
pensionnat triste. Elle a reproduit la même mystification en me harponnant avec
ces deux vies entremêlées d’une institutrice qui a tout pour passez sous mon
radar. Je me suis retrouvé véritablement peiné de voir cette existence fictive
prendre fin. Ça ne m’avait pas fait ça depuis l’épisode final de Six Feet Under, où l’on faisait de
rapides sauts dans le temps pour voir ce que l’avenir réservait aux personnages.
C’était du pathos un peu facile, j’en conviens, mais après avoir partagé la vie
de cette famille pendant 6 saisons, c’était touchant.
Mes vrais enfants, c’est du même acabit : du portrait de
femme inspiré et inspirant. L’une de ces deux femmes fictives a encore moins existé
que l’autre, et pourtant l’auteure est arrivée à les incarner si puissamment qu’elles
vous marquent, ces deux versions de Patricia. D’ailleurs, comme le disait un
autre poète :
Nos histoires
d'amour sont les mêmes
Comme si nous
avions pratiqué
Dans des piscines
parallèles
La natation
synchronisée
Ça surfe sur toutes les modes du moment (homosexualité, libération de la femme,....)
RépondreSupprimerLa fin est tellement subtile !
Je n'ai pas aimé du tout malgré les avalanches de louanges élogieuses des professionnels de la profession...