Midnight Mass (Les Sermons de minuit en VF) est une mini-série de 7 épisodes disponible sur Netflix. Donc pas un truc à rallonge : une histoire solide et auto-suffisante qui n'appelle aucune suite. Un récit qui prend son temps, qui installe une ambiance et des personnages complexes. Il va m'être difficile d'en parler explicitement sans rien divulgâcher, aussi vais-je essayer de vous titiller sans trop vous en révéler.
C'est l'histoire de Riley, un jeune homme alcoolique qui a mené la belle vie à Chicago dans le monde des start-up. Mais un soir, il provoque un accident de la route et tue une jeune fille lors d'un choc frontal. Vont s'en suivre 4 années de prison puis le retour de Riley chez ses parents. Il est désormais ruiné, abstinent et démoli et retrouve l'île de pêcheurs où il a grandi. C'est une petite communauté autrefois florissante qui périclite aujourd'hui. Les pêcheurs survivent à peine, il y a eu une fuite de pétrole il n'y a pas longtemps, beaucoup de maisons sont abandonnées... Bref, l'endroit parfait pour déprimer en sortant de prison. Et quand Riley débarque du bateau qui fait la liaison entre l'île et le continent, on comprend que le vieux curé qui s'occupait de cette paroisse isolée a eu un pépin de santé alors qu'il était en voyage. Le diocèse a donc envoyé un jeune remplaçant qui va prendre sa mission apostolique au pied de la lettre : il est là pour offrir la rédemption à ses paroissiens. L'église vétuste va redevenir le centre du village, au sens propre comme au sens figuré. Mais bien sur, des trucs et des machins vont se passer.
On a donc affaire à une communauté exsangue avec plusieurs personnages marquant : le shérif musulman, le vieil alcoolique qui a paralysé une jeune fille lors d'un accident de chasse, la jeune institutrice qui est revenue du continent enceinte, la bonne du curé qui semble diriger l'île, les adolescents qui s'ennuient, la médecin qui doit s'occuper de sa vieille mère sénile... Ces gens mènent des vies difficiles sur l'île, et le nouveau curé va immanquablement bouleversé ces existences un peu mornes. Un bon vieux huis-clos à ciel ouvert où l'on pense immanquablement à ces villages de pêcheurs à la Lovecraft où les habitants sont tous plus ou moins Profonds. Je ne vous dirai rien sur la nature surnaturelle de la série, mais elle va immanquablement faire résonner vos neurones de rôliste, car pour nous, c'est du déjà-vu.
Ne vous attendez pas à de l'horreur à base de scare jump putassiers : on est plutôt en présence d'une horreur psychologique. La série parle d'atavisme, de renaissance, de culpabilité, d’incommunicabilité et autres joyeusetés. Il y a bien un monstre, toutefois il est assez périphérique à l'intrigue. C'est plus un catalyseur. Les 7 épisodes offrent vraiment de belles réflexions sur la condition humaine, la foi et une forme d'horreur cosmique. Les acteurs livrent tous une performance délicieuse, en particulier le nouveau curé, qui déborde de charisme. En tant qu'athée, c'est le genre de récit qui habituellement me laisse de marbre, mais la série a réussi à m’hameçonner proprement.
Le créateur et réalisateur de la série (Mike Flanagan) m'avait déjà bluffé avec The Haunting of Hill House et dans une moindre mesure avec Doctor Sleep. Sans surprise, il a été élevé dans la religion catholique puis a connu des déboires avec l'alcool, au point de devenir sobre et athée. On comprend donc pourquoi son Riley est si crédible. Ça faisait des années qu'il voulait raconter cette histoire, à un tel point que le titre Midnight Mass apparaît en clin d’œil dans deux de ses précédentes productions.
Bref, c'est de la télévision lancinante, qui ne se précipite pas pour avoir un punch artificiel avant chaque page de pub. On fait la connaissance des parents de Riley, on apprend à cerner son père qui n'est pas capable de communiquer avec lui. On suit de loin en loin la cohabitation du shérif et de son fils. On tremble devant la nocivité viscérale de la bigote du village. Ça se savoure à petite gorgée. Et puis, bien sûr, les meurtres commencent...
Je ne vous dirais pas pour quel JdR cela ferait une bonne inspiration, car ce serait vous gâcher le plaisir de la lente découverte, mais cette ambiance pesante et cette folie collective fonctionnent avec bon nombre de jeux de votre ludothèque, pour sûr. Et au pire, si vous n'arrivez pas à recycler cette matière lors de votre partie du samedi soir, vous aurez assisté à une superbe tragédie humaine.
ils parlent trop !! mais genre 10 x trops !
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