Précision pour les lecteurs distraits : il ne s'agit pas de la biographie de Jean Tigana.
Imaginez une sorte d'Italie déformée, une Italie de fantasy. Une terre qui sert d'échiquier entre deux tyrans d'une autre nation qui se partagent ce gros gateau dans l'espoir d'amasser assez d'or et de puissance pour prétendre au trône de leur pays d'origine. Oui, tout comme certains généraux romains guerroyaient dans des provinces lointaines pour revenir couverts de gloire à Rome. Et dans cette Italie médiévale où la magie fonctionne, un sorcier maudit un jour toute une nation et la raye de la conscience des hommes. Désormais, plus personne (ou presque) ne se souvient de Tigana. Seule une poignée d'hommes se rappelle de leur fierté nationale et jure de venger l'affront fait à leur peuple. L'intrigue nous fait suivre différents personnages, dont une troupe de chanteurs et une concubine de harem.
Guy Gavriel Kay est canadien. Ça doit être le plus gros vendeur de fantasy du Canada car ses bouquins sont très présents sur les étagères. Des gros pavés qui ont tous pour cadre une nation ou un civilisation de notre Histoire que l'auteur s'amuse à plonger dans la fantasy en créant une Chine de synthèse, un ersatz d'Espagne, un reflet de l'empire romain. Le monsieur a même participé au travail de compilation du Silmarillion.
Tigana a une thématique très intéressante : la quête de l'identité nationale. Pas celle où l'on cherche à faire peur en diabolisant le voisin qui n'a pas le même bronzage, non, celle plus noble d'une nation maudite qui n'a même pas conscience de s'être oubliée. Le Breton, le Québecois ou le Séquanodionysien sauront y trouver un écho de leur réalité identitaire. C'est La découverte ou l'ignorance en roman.
Sauf que.
800 pages. Une montagne qui accouche d'une souris. Ça traine en longueur, pire qu'un dimanche pluvieux avec la énième rediffusion de L'aile ou la cuisse. La vengeance des descendants de Tigana traîne sa mollesse sur des pages et des pages. Oh, il y a bien quelques péripéties, mais elles peinent à justifier autant de bla-bla. Le récit se transforme lentement en bourbier. Je me suis ainsi empêtré dans plusieurs chapitres sans que j’arrive à me rappeler qu’il s’y soit passé quelque chose d’important ou de vaguement excitant. D'ailleurs, le livre a poireauté de nombreuses soirées sur ma table de chevet, ce qui est assez révélateur de mon manque d'enthousiasme. 800 pages, c'est beaucoup trop pour cette histoire. Pour bien faire, il faudrait arracher une page sur deux du livre.
Un mot maintenant sur la réinvention de l’Italie medfan. Je suis du genre à penser qu’il faut faire plus que de simplement renommer le café « khav » pour faire rêver un lecteur. Je ne demande pas des dragons et une prophétie, mais un minimum de détails pour donner de la profondeur au décor. Des jargons, des coutumes bizarres, un paysage qui fascine. Mais les provinces de ce pays imaginaire ont toutes la même saveur. Je n’ai jamais été embarqué dans cet univers, l’auteur a gardé une distance permanente entre moi et son univers. L’Italie est une terre éminemment variée, mais son pendant fantasy est très limité. Et les personnages n'ont rien fait vibrer en moi. On m'avait parlé d'une filiation avec Dumas, mais je n'ai rien lu de tel.
Donc, une question aux lecteurs de Guy Gavriel Kay : est-ce que ses autres bouquins sont du même tonneau ? Parce qu’à lire les 4èmes de couverture, je suis intéressé par ses propositions littéraires, mais comme j’ai l’impression qu’il n’écrit rien en dessous de 800 pages, je n’ai pas envie de me retrouver encore une fois enlisé dans un autre pavé. Suis-je tombé sur un roman faible du monsieur ?
J’aurais aimé aimer Tigana. On est loin d'un livre édité par Bob, mais ce n'est clairement pas le livre que j'ai cru voir dans les critiques laudatives suivantes :
Bien aimé Les lions d'Al Rhassan et Le dernier rayon du soleil. Dans les deux cas je n'ai pas eu d'impression de longueur même si la technique semble être la même que pour Tigane.
RépondreSupprimerJe suis également intéressé par savoir ce que valent ces autres bouquin, La tapisserie de Fiovnaqqchose tant venté par certain m'était tombée des mains avant la fin du premier volume.
RépondreSupprimerEt ça que je l'avais lue à une époque où j'étais meilleur public. Je voulais redonner sa chance au bonhomme mais là tu viens de me doucher.
Tigane, je crois que je n'ai point lu. Ceci dit, j'avais beaucoup aimé ses autres bouquins, et la trilogie de Fionavar reste une de mes préférées. Mais peut-être ai-je évolué et qu'il ne correspond plus à mes goûts ?
RépondreSupprimerEn tout cas, voilà une critique bienvenue quand on sait que GGK vient de sortir son nouveau bouquin "Under Heaven" ;) (oui, mettre l'auteur en avant avec un de ses anciens bouquins, blabla)
Curieux, j'étais sûr que tu n'aimerais pas plus que ça. Je comprends mieux ton aversion pour Hobb. ;o)
RépondreSupprimerComme Efelle, je placerais en tête des romans de Kay Les lions d'Al Rassan, mais sans être sûr, toutefois, qu'il te convienne mieux que Tigane.
Quant à La tapisserie de Fionavar, je dirais, au contraire de Cédric Jeanneret, que cette oeuvre m'a plu alors qu'elle me semble, à moi, tant décriée . Comme quoi. Certes, c'est du Tolkien-like. Mais on y retrouve des avatars de Hugin et Munin. Les originaux. Les corbeaux d'Odin. Alors, rien que pour ça.
Et, de fait, Kay utilise toujours le même registre. Des sortes de romans pseudo-historiques. C'est sa marque de fabrique. Son créneau.
Bien aimé "Les Lions d'Al-Rhassan", "La Mosaïque de Sarance" et "Le Dernier rayon de soleil". En revanche, je n'ai pas aimé du tout "La Tapisserie de Fionavar". "Tigane" est le seul bouquin en vf de Kay que je n'ai pas lu.
RépondreSupprimerEn tout cas, j'ai bien aimé le côté fantasy historique, comme une sorte de réalité alternative, et même s'ils sont épais, je n'ai pas trouvé ça spécialement long. En tout cas, pas plus que d'autres séries de fantasy à rallonge...
Merci pour ces retours/conseils sur les autres livres de GGK. Je crois déceler une incompatibilité entre son oeuvre et mes goûts, aussi je ne vais pas trop insister.
RépondreSupprimerPas aimé du tout la Tapisserie de Fionavar pour son côté trop Melting pot nawak.
RépondreSupprimerMon Tigana fait dans les 600 pages, p'tet pour ça que j'ai bien aimé ?
RépondreSupprimerPerso, mon préféré reste Al-Rassan, mais je pense effectivement que si tu n'as pas du tout aimé Tigana, l'oeuvre de Kay n'est certainement pas faite pour toi.
De GG Kay, j'ai essayé :
RépondreSupprimerLa Tapisserie de Fionavar : ai tenu 100 pages. J'aurais encore le bouquin aujourd'hui, je le refilerais à Bob. Malgré la présence des corbeaux. ;)
Une Chanson pour Arbonne : je n'ai pas un grand souvenir de cette lecture, qui fut quand même assez agréable pour que je décide de m'intéresser à nouveau à Kay et de lire Tigane.
Tigane, donc : un thème fabuleux, que j'aurais aimé aimer, mais un traitement long, laborieux, et une histoire qui se perd en péripéties inintéressantes. Je rejoins donc Cédric sur son appréciation du livre. Peut-être qu'un jour j'essayerai un autre GG Kay, mais chat échaudé craint l'eau froide.
J'ai aussi beaucoup aimé Al Rassan, que j'avais préféré à Tigane, au final.
RépondreSupprimerConcernant Tigane, je l'avais lu dans l'édition super classieuse de l'Atlante (tout de suite le bouquin est meilleur).
Le truc le plus amusant, dans tout ça, c'est que la critique que j'avais écrite il y a une dizaine d'années ne me donne pas du tout envie de lire le livre (dont j'ai tout oublié, sauf le procédé).
Je l'avais lu sur une suggestion de Stéphane Marsan, je crois, qui trouvait qu'il y avait des rapports avec ce que je faisais.
Ca me donne envie de le relire pour me (re)faire une idée. Mais 600 pages de fantasy, quand même... Hum. Pas tout de suite.
Cette critique m'a rappelé que je l'ai lu dans le passé et que ce fut une véritable torture. Je n'avais rien à lire d'autre, je me suis forcé à aller jusqu'au bout, mais que de verbiage! Du coup j'ai étét dégouté de G.G. Kay à vie, et je ne lui donnerai pas de seconde chance...
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