1912. Le comte de Grantham essaye désespérément de marier
ses trois filles et de se sortir d’une impasse financière causée par un contrat
de mariage très contraignant qui déshérite ses enfants. Il faut séduire des
fils de bonnes familles, gérer le domaine et tenir le petit personnel d’une
main de fer. C’est la vie de château, la vraie. Et sous ses pieds, une armée de
petites mains s’active pour préparer des repas somptueux, faire les lits,
briquer l’argenterie. Deux mondes qui cohabitent dans une demeure magnifique où
chacun est bien à sa place, le vêtement bien amidonné et la dignité grave.
Une noblesse qui est obligée de maquignonner ses filles,
donc. Et en plus, les trois sœurettes ne peuvent pas se piffrer. L’ainée est
hautaine, sans cœur. La seconde intrigante car moins belle. La petite dernière
est une mignonne suffragette. À cela s’adjoint une comtesse douairière exécrable
qui décoche des répliques blessantes comme si elle était à Fort Alamo et un
lointain cousin qui doit hériter de la baraque par la magie notariale. Ça
magouille, ça fait un drame de tout et ça boit du thé dans le grand salon en
organisant le prochain bal des débutantes ou en se demandant si on ne va pas
virer le chef des palefreniers.
Mais la série à la bonne idée de suivre également la
piétaille en collant aux basques du majordome, du premier valet de pied, de la
cuisinière, de l’intendante, de l’apprenti, de la femme de ménage… Une armée de
l’ombre qui vit des drames moins clinquants mais tout aussi intense. Ça
magouille entre deux services, ça fricote dans les combles, ça écoute aux
portes et donne son avis… Et c’est au final bien plus intéressant que le
dramelet qui se passe à l’étage, ce qu’avait déjà démontré le film Gosford
Park. Mais les deux niveaux composent un tableau riche qui met vraiment bien en
scène cette bulle sociale anglaise.
Si j’en ai après cette série, c’est pour son sens très
étrange de la temporalité. Le premier épisode débute en 1912, et lors des 7 épisodes
de la première saison, on voit Downton traversé un magnifique été anglais avec
de nombreux plans dans le grand jardin verdoyant. On a une unité de temps, c’est
une espèce d’été perpétuel. Pourtant, au 6ème épisode, on nous
indique qu’on est en 1914. Or les évènements auxquels on a assisté jusque là ne
s’étalaient pas visuellement sur deux ans. Ça ne fonctionne tout simplement
pas. Bon, c’est une des bizarreries habituelles du soap opera, où les enfants
grandissent d’un coup entre deux épisodes, mais là c’est choquant car on sent
bien une volonté de fabriquer de l’historique crédible alors que la narration
ne suit pas la cadence. Pas au point de décrocher de la série, mais c’est
dommage car ça brise la suspension consentie de l'incrédulité.
Sinon, c’est évidemment génial pour Maléfices ou l’Appel de
Cthulhu. Les décors et les tenues sont magnifiques, il manque plus qu'une tentacule ou une subtile odeur de souffre.
PS : le visionnage de la seconde saison tempère hélas énormément mon enthousiasme. La série passe de l'historique au soap opera le plus crasse, avec comme point d'orgue le retour d'un personnage que l'on croyait mort (sic), qui est amnésique (re-sic) et qui est défiguré (achevez-moi). Les incohérences temporelles continuent de plus belle : la narration fait des bons d'un an entre deux épisodes, mais les intrigues restent en plan comme si le temps ne passait pas. C'est toujours le même été anglais éternel. Je fais une indigestion des nobles qui confient tous leurs secrets à leur femme de chambre en disant "Mon dieu, la guerre, grosse malheur." Ça reste très beau, les décors sont toujours aussi somptueux, mais c'est de plus en plus gros, l'effet de découverte n'est plus là.
PS : le visionnage de la seconde saison tempère hélas énormément mon enthousiasme. La série passe de l'historique au soap opera le plus crasse, avec comme point d'orgue le retour d'un personnage que l'on croyait mort (sic), qui est amnésique (re-sic) et qui est défiguré (achevez-moi). Les incohérences temporelles continuent de plus belle : la narration fait des bons d'un an entre deux épisodes, mais les intrigues restent en plan comme si le temps ne passait pas. C'est toujours le même été anglais éternel. Je fais une indigestion des nobles qui confient tous leurs secrets à leur femme de chambre en disant "Mon dieu, la guerre, grosse malheur." Ça reste très beau, les décors sont toujours aussi somptueux, mais c'est de plus en plus gros, l'effet de découverte n'est plus là.
maquignonner. suffragette. douairière. je ne connais pas ces mots... ducoup je V allez chercher... :(
RépondreSupprimerTu n'as même pas besoin de me convaincre, je regarde déjà (et toc)
RépondreSupprimercritique excellente.
RépondreSupprimerstyle attrayant.
;)
à suivre.
Merci
La saison 3 relève largement le niveau de la médiocre saison 2.
RépondreSupprimerLe monde change, et le petit univers de Downton Abbey doit s'adapter, même si cela se fait dans la douleur.
Arght, Trickster, tu vas me faire douter. C'est mal.
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