Chambres froides


Le succès tardif de La trilogie berlinoise de Philip Kerr permet un truc pas dégueu pour son éditeur français : rééditer des vieux textes déjà bien amortis. Chambres froides est un roman de 1993 qui met en scène un flic moscovite tellement insipide que je ne peux même pas vous dire son nom après 320 pages de lecture. Ce policier est envoyé à Saint-Petersbourg dans le cadre d'un programme de collaboration entre les polices des deux villes. Il est là pour assimiler la méthode qu'a développée le flamboyant colonel Grouchko pour lutter contre les mafias locales. Et comble de chance, à peine débarqué à Saint-Petersbourg, notre flic de Moscou et son confrère sont confrontés à l’exécution du plus pugnace des journalistes du coin. Le genre qui fourre son nez là où il ne faut pas. Et tout porte à croire que c'est une des mafias culturelles locales (géorgienne, tchétchène ou autre) qui a fait le coup. D'où enquête.

Le décor est gorbatchevien en diable : pénurie à tous les étages, corruption galopante, vodka à gogo, libéralisme sauvage... C'est de la Russie peinturlurée au rouleau : les gars citent du Pasternak au petit-déjeuner, balancent des blagues soviétiques en cadence et évoquent Béria tout en se désolant sur la dérive individualiste d'une société qui a perdu tous ses repères. C'est caricaturale : les entreprises sont toutes corrompues, le KBG est antisémite, les bourrins du commando d'intervention regardent des films d'Arnold Schwarznegger, les mafieux sont attirés par l'or comme des pies débiles... C'était sans doute neuf en 1993, mais 20 ans plus tard, c'est du réchauffé. Surtout avec un personnage central qui n'a aucune présence et qui ne fait rien du point de vue narratif si ce n'est être le témoin des progrès de Grouchko. La couverture passe-partout et le titre interchangeable ont fait que je n'ai pas vu l'intrigue se diriger tout à coup vers un thème pourtant annoncé avec des gros sabots.

Commentaires

  1. Kerr n'aime pas les russes, c'était déjà assez visible avec le dernier opus de la trilogie berlinoise.
    Je suis de passage sur votre blog (en provenance des soutes infâmes du grog) et vous remercie de m'avoir donné envie de lire Alexandra Marinina.
    Je me demandais ce que vous aviez pensé d'un de L'Evangile du Bourreau des frères Vainer. Je n'en ai pas trouvé la critique ici, pourtant je ne peux pas m'imaginer que vous ayez laissé passer ce chef d'oeuvre!
    Amicalement

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