Cela dit, mes
lassitudes de lecteur blasé ne sont pas le sujet. En route pour l’habituel tour
d’horizon.
• Artifact, de Fred Chappell, nous parle
d’un objet antique, de familles dont l’histoire remonte loin et du péril qu’il y a à mélanger des dimensions. Lovecraftienne
sans respecter le mythe de Cthulhu, elle m’a bien plu.
• Half Lost in Shadow, de W. H. Pugmire,
se passe à Kingsport, baigne dans une ambiance onirique juste comme il faut, et
ne m’a pas passionnée plus que ça. Peut-être parce que je suis immunisé aux
« poèmes en prose » lorsqu’ils sont rédigés en anglais ?
• The Rasping Absence, de Richard Gavin,
est à la fois une histoire d’obsession qui finit mal et une histoire de couple
qui se brise. Elle fonctionne bien dans les deux registres, mais ne m’a pas
emballé.
• Black Ships Seen South of Heaven, de
Caitlin R. Kiernan, est un petit bijou post-apocalypthulique. R’leyh est
sortie, la civilisation s’est effondrée, et des survivants se terrent dans ce
qui fut Chicago, se protégeant des mutants de l’extérieur et des sectateurs de
l’intérieur. Je n’ai que du positif à en dire.
• The Dark Sea Within, de Jason V Brock,
nous parle de Prague, du milieu des collectionneurs, du danger qu’il y a à
vendre (même en toute bonne foi) de faux tableaux et des ennuis qui en
découlent. Elle est plus courte que la moyenne, et ça me va bien comme
ça : je n’ai pas accroché.
• Sealed by the Moon, de Gary Fry, est une
petite histoire basé sur le folklore du Yorkshire. L’auteur ne nous laisse pas
oublier qu’il a une formation de psychologue – comme son héros – et la fin est
un tantinet prévisible, mais dans l’ensemble, elle tourne bien.
• Broken Sleep, de Cody Goodfellow, nous
parle de sommeil, des Contrées du rêve et de ce que notre époque en a fait, le
tout dans un habillage légèrement science-fictionnel. Bonne pioche, qui répond
à certaines de mes préoccupations du moment et est juste assez grinçante pour
m’amuser.
• A prism of Darkness, de Darrell
Schweitzer, nous raconte la dernière nuit sur Terre du Dr John Dee, sorcier
élizabethain, traducteur anglais du Necronomicon
et propriétaire d’un miroir noir qui a beaucoup fait fantasmer Jean Ray. Courte,
sans prétention et agréable.
• Night of the Piper, d’Ann K. Schwalder,
nous expédie dans l’Ouest américain, et annexe Kokopelli, une créature du
folklore indien, au mythe de Nyarlathotep. Avec son héroïne qui enquête parce
qu’elle a déjà été exposée au surnaturel, elle a une petite vibe rôliste pas déplaisante.
• We Are Made of Stars, de Jonathan
Thomas, souffre d’un sytle un peu pesant à mon goût. À part ça, elle se tient
bien. Devinez qui laisse des graffitis du type « les étoiles sont presque
en place » sur les monuments de Providence ?
• Trophy, de Melanie Tem, plonge dans le porno-gore
tendance mutilations, snuffs movies et autres bricoles du même ordre. C’est
assez léger pour être grand public, plutôt bien fait… et grave pas ma came. Merci,
mais non merci, donc.
• Contact, de John Pelan et Stephen Mark
Rainey, raconte les malheurs d’un groupe de géologues qui arrive sur Pluton
pour exploiter un champ de minerai rare, et qui découvre que la place est déjà
prise. La fin est prévisible, mais le reste est plaisant.
• Cult of the Dead, de Lois H. Gresh, nous
parle des catacombes sous un monastère péruvien, de l’antagonisme entre Indiens
et Espagnols, et de cosmogonie inca. Je suis ambivalent : elle vise à un
effet coup de poing et l’atteint, mais c’est au détriment de trop d’autres
choses…
• Dark Redeemer, de Will Murray, est une
histoire du CEESP, où des agents d’un organisme gouvernemental américain se
promènent hors de leur corps et découvrent la vérité sur Nyarlathotep – une
« vérité » hérétique, mais bien trouvée. D’une anthologie à l’autre,
je commence à avoir lu assez d’histoires du CEESP pour réaliser qu’il subvertit
joyeusement le cliché des « supers G-Men qui sauvent le monde ».
Delta Green, mais Delta Green qui rate ses missions et enfonce encore plus le
monde dans les ennuis…
• In the Event of Death, de Simon
Stranzas, redescend d’un ton, avec une histoire à trois personnages : un
écrivain qui vient de perdre sa mère, son épouse et sa tante. Bonne histoire,
peut-être un poil trop allusive à mon goût.
• Revival, de Stephen Woodworth, est aussi
courte que prévisible, et m’a donné l’impression d’un truc déjà lu des dizaines
de fois – y compris dans des suppléments de jeu de rôle, et cette fois, ce
n’est pas un compliment.
• The Wall of Asshur-sin, de Donald Tyson,
nous parle d’archéologie, du Yémen, et d’un monument improbable. Encore sectateurs,
cérémonie d’invocation, monstres et décor insolite et grandiose, elle veut
aller vers l’action, mais tombe à plat : certaines scènes m’ont donné
l’impression de sortir d’un OSS 117,
humour décalé en moins. Toutefois, les deux dernières phrases rachètent ses
faiblesses.
• Fear Lurks Atop Tempest Mount, de
Charles Lovecraft, relève de la poésie, genre pour lequel je me déclare une
fois encore incompétent. Cela dit, que vous inspire un type qui change son nom
pour se faire appeler légalement « Lovecraft » et qui réécrit La peur qui rôde en dix courts
poèmes ?
Je garde avec
plaisir Artifact, Black Ships Seen South of Heaven et Broken Sleep. Sealed by the Moon, Night of
the Piper, Contact et Dark Redeemer sont également
sympathiques. Le reste se tient un cran en dessous, même s’il n’y a pas de
vrais loupés.
(Titan Books, 400
pages, 17 nouvelles et un cycle de poèmes, environ 15 €)
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