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Adam Fisk
est un Américain qui est parti faire ses études de graphisme à Toronto pour
fuir sa famille et une petite ville merdique. Son père, en homme d’affaires,
désapprouve les études de son fils mais heureusement pour Adam, il peut compter
sur le soutien financer d’une grand-mère fantasque. Mais quand elle subit une
attaque et doit être placée en maison de retraite, Adam n’a plus les moyens
d’étudier à Toronto. Désespéré à l’idée de retourner dans sa ville natale où
l’attend une petite-amie et la promesse d’une vie plan-plan, il passe des tests
payants pour connaître l’Affinité à laquelle il pourrait éventuellement
appartenir. Les Affinités sont 22 nouvelles familles sociales que Meir Klein a
identifiées. Et justement, Adam est un Tau, un membre des cinq familles les
plus influentes de ce nouvel ordre social en gestation. Et sa vie de perdant va
du jour au lendemain se transformer en réussite sociale car appartenir au Tau
apporte de nombreux avantages. Sauf qu’évidemment, on ne remodèle pas une
dynamique sociale sans créer des tensions.
Robert
Charles Wilson est un Américain qui a décidé de s’installer au Canada, donc il
y a sans doute un peu beaucoup de lui dans Adam Fisk, encore que c’est un
personnage finalement assez intangible. L’auteur aime toujours autant traiter
de la vie ordinaire de ses personnages plutôt que se concentrer sur le
changement majeur qui propose invariablement ses univers de SF. Et c’est encore
le cas ici : on passe beaucoup plus de temps à suivre la vie d’Adam Fisk
au lieu de traiter en détails l’impact des Affinités sur le monde. Et ce n’est
pas un défaut : la vie sentimentale d’Adam et ses relations conflictuelles
avec son père et son frère sont intéressantes. C’est juste que par moment, on
aimerait bien que l’auteur utilise toutes les idées qu’il avance. Parce que
finalement, des 22 Affinités, on ne parle que de deux d’entre elles. On ne
verra jamais tout ce que ça implique comme changements sociétaux car le point
de vue d’Adam est très parcellaire sur la question. Même si j’ai aimé suivre Adam
tout au long de son cheminement, c’est typiquement le genre d’histoire où un
récit choral aurait permis d’offrir plusieurs angles d’attaque et donc de
traiter le décor à fond. Car quand les enjeux deviennent sérieux dans l’intrigue
avec un conflit ouvert entre deux Affinités, je n’ai pas senti l’envergure du
truc. Ça ressemblait à deux sections du Rotary Club qui se cherchent des
noises, pas à un gigantesque complot proposant une nouvelle lutte des classes.
Car l’idée
des Affinités est intéressante : un groupe sociologique avec qui tout est
plus simple. Ils vous comprennent naturellement, ils fonctionnent comme vous,
ils vous font confiance. À un moment où tout le monde est fier d’être un X, un
Y ou un millénial, les Affinités touchent une corde sensible. On se cherche
tous un clan, des gens avec qui on ne se prendra pas la tête. Ce n’est pas pour
rien si on vire untel de Facebook car il poste systématiquement des articles avec
un argumentaire qui nous hérisse le poil : on veut se retrouver entre gens
de bonne compagnie. C’est humain. Et si en plus une Affinité vous permet
d’obtenir un boulot, des contacts, on entre alors dans le fantasme franc-maçon
par excellence : l’entre-soi.
Bref, un
roman malin qui parle du sentiment d’appartenance et de notre besoin de se
chercher des semblables. Mais aussi un bouquin qui laisse aussi un gout
d’inachevé car il y avait plus à dire et à faire avec un tel postulat.
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