Tout seul, on va plus vite. Ensemble, on va plus loin.
C'est le slogan qui sous-tend tout le game design du nouveau jeu des éditions Dystopia, "Bois Dormant". Dystopia, c'est le petit éditeur qui a eu le bon goût d'éditer les nouvelles de Léo Henry et CFC dans leur univers de Yirminadingrad, ainsi que les oeuvres de T. Ligotti, entre autres excellents ouvrages. Un éditeur à suivre, donc. Et v'la-t'y-pas qu'ils se mettent à publier du jdr. Joie, surtout s'ils y mettent le même niveau d'exigence que pour le reste de leur catalogue.
Et c'est bien le cas.
L'apocalypse est très localisée, un peu comme dans le roman "Les Derniers Jours du Nouveau Paris" de China Miéville ou Neige de Convard & Gine : soudainement, une maladie s'est répandue dans la ville. Les gens ont commencé à s'endormir, sans jamais se réveiller, sans vieillir ni mourir, comme en stase. Effrayées, les autorités ont alors mis la ville sous cloche. Impossible d'entrer ou sortir. Elle est désormais aux mains des survivants, qui se sont réorganisés en bandes et en gangs. Les joueuses incarnent l'une de ces communautés, résolument pacifique, et la mécanique est orientée afin de pousser le jeu dans la direction du slogan qui orne cet article.
Notez que je n'ai pas précisé de quelle ville il s'agit. En fait, les joueuses vont d'abord se répartir les rôles d'organisation (chez qui on joue, qui s'occupe de la nourriture, des règles, etc.). Ensuite, elles vont définir le contexte : dans quelle ville l'histoire se passe t'elle ? Paris, Le Caire, Hong Kong, Chartres, Sauteyrargue ? Quels sont les membres de la communauté ? Les PJs, via des archétypes, mais aussi les PNJs (membres de la communautés, gangs, etc.). Il s'agit d'une création d'univers partagé. Enfin, elles vont se répartir les Domains, qui sont un rôle à part entière, comme un personnage et qui représentent les menaces autour de la communauté.
Rôles de PJs, par exemple : la Bricole, la Main-verte, le Graff...
Menaces (appelés Domaines) : les Gangs, les Pénuries, la Nature, le Blocus du Gouvernement...
Le jeu n'utilise pas de dés, tout au plus des jetons en 4 couleurs (pour les 4 saisons). Chaque PJ est défini par un archétype qui, comme dans les PBTA, amène à une feuille de personnage dédiée, avec des actions ("moves") définies. De même pour les menaces.
Sans tour de rôle précis, les joueuses vont raconter l'histoire de leur communauté, faire intervenir leurs personnages, jouer les PNJs, faire agir leur menace. Les jetons forment une économie qui permet de faire intervenir un type de personnage, changer de saison, ...
Et ce sont ces jetons qui poussent vers le slogan. Dépenser des jetons est l'unique moyen de faire qu'un action finisse mieux que "mal ou mitigé". Et on en reçoit quand on aide les autres via son action Gentillesse ou qu'on enrichit l'histoire (activer des PNJs, choisir la saison, etc.)
Les feuilles (de rôle et de Domaine) comportent des questions à poser à ses voisines pour alimenter la fiction et aider à la création de l'univers de jeu. De plus, elles fournissent des conseils de jeu, via des principes ou des "fais ceci quand...".
Autre point intéressant : certaines actions de Domaine impliquent de laisser le rôle à une autre joueuse, en échange du sien, ce qui fait tourner les Domaines et permet de renouveler un peu le jeu pour chacune.
Le livre propose un exemple complet de création et de jeu, avec quelques joueuses autour du Caire. De plus, les feuilles pour cet exemple sont mises à disposition dans l'ouvrage, si on veut un cadre déjà créé, ou voir ce que ça donne.
Le concept est clair et original, les règles sont limpides et les mécaniques ont l'air particulièrement peaufinées. Je n'ai pas encore pu le tester mais la lecture fait très envie ! Heureusement, d'autre l'ont fait et vous pouvez donc aller regarder l'Actual Play par les amis de 2d6+Cool :
Bois Dormant, 144 pages, chez Dystopia. Sortie le 1er mars 2021, 20€
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