The Rookie : le flic de Los Angeles


Ou comment perdre toute crédibilité prescriptive en conseillant une série télé populaire

J'aime Nathan Fillion. Voilà, c'est dit. Je le trouvais génial dans Firefly/Serenity, je l'appréciais dans Castle malgré l'imbécilité de la série. Il joue toujours le même personne qui cabotine un peu mais qui est bon comme le bon pain. Et donc, son dernier projet en date se nomme The Rookie. Il y incarne John Nolan, un mec de 45 piges qui après son divorce et le départ de son fils pour la fac décide de se réinventer en intégrant l'école de police afin de devenir flic à Los Angeles. Et au moment où la série débute, John entame son année de formation sur le terrain en patrouillant avec son instructrice. On va donc le suivre au quotidien alors qu'il doit apprendre la dure réalité du terrain et qu'il est (selon les standards policiers) un dinosaure. Les autres recrues sont jeunes et pleines d'énergie, lui commence sa deuxième vie. Évidemment, John a pour lui l'expérience de l'âge, une grande empathie et un indécrottable optimisme de boy scout.

On découvre donc la vie des patrouilleurs qui arpentent inlassablement la rue. Enfin, qui conduisent inlassablement des véhicules de patrouille climatisés. Ils répondent à des appels d'urgence, ils gèrent des conflits familiaux, des vols à l'arrachée, des conduites en état d'ébriété... ET UNE ALERTE NUCLÉAIRE. Oui, bon, faut pas se leurrer : les scénaristes ont régulièrement recours à de gros artifices pour maintenir le suspens. Nolan tire plus souvent avec son flingue en une saison qu'un flic lambda pendant toute sa carrière au sein du LAPD. Mais derrière certains épisodes clichés, il y a une série de qualité qui met l'emphase sur un truc qui me plait : la relation entre l'instructeur et la bleusaille. Comme on ne suit pas uniquement John Nolan mais également les deux recrues Lucy Chen et Jackson West, on a droit à un joli éventail de situations. Les policiers qui les encadrent sont faussement intransigeant, les 54 épisodes répartis sur 3 saisons leur donnent de la place pour évoluer. On s'attache à la petite famille que forme ce precinct.

Alors pourquoi j'en parle, de cette série policière calibrée pour plaire à tout le monde ? Eh bien elle alimente deux de mes univers de jeu : Wastburg et D3. En effet, le côté on-répond-aux-appels-du-quotidien colle parfaitement aux missions des gardoches. C'est de la police de proximité, c'est bourré d'idée de situations ou de personnages à recycler. En particulier les instructeurs, qui offrent du jeu à la pelle. Si on part du principe que les trois recrues sont des PJ, elles sont le plus souvent séparées, mais l'intrigue permet aux personnages de se croiser à des moments charnières. Ils ont chacun une intrigue indépendante, qui peut éventuellement se rejoindre ou bien se percuter. Mais le retour au precinct et la vie après le boulot permettent également de rattacher les trois existences. Si on met de côté les abus scénaristiques (comme une énième guerre des gangs avec une narco-trafiquante qu'on croirait sortie du film El Mariachi), il y a de bonnes bases pour alimenter le quotidien d'un groupe de gardes. Tout n'est pas transposable, mais la mécanique générale du duo instructeur/bleusaille est vraiment une belle opportunité de jeu.

Et pour D3, c'est également une excellente source d'inspiration. Le precinct n'est pas forcément très réaliste (par exemple, il y a un seul sergent pour faire tourner la boutique), mais il peut servir de point de départ pour animer le cadre de jeu des PJ. Car sous le prétexte de raconter une enquête en 42 minutes, la série taquine par moment des thématiques intéressantes. Que peut se permettre un flic infiltré dans le crime organisé ? Comment réagir quand on tombe sur un collègue raciste ? C'est quoi le prix à payer au niveau personnel pour vivre une vie de flic ? Je ne dis pas que tout est traité subtilement (vous allez parfois lever les yeux au ciel), mais la série offre un bon compromis entre réalisme et amusement. Hors cet équilibre, c'est aussi lui que je recherche en JdR. C'est bien cool d'injecter du vrai dans les enquêtes, mais si ça transforme le jeu en travail, c'est que j'ai raté mon coup. Dans The Rookie, on se retrouve parfois confronté à des facilités scénaristiques, mais le but est de rester amusant. C'est pas du gros polar dépressif : on est à LA, il y a du soleil, John Nolan finit toujours par avoir raison...

Bon, et le fait que le héros connaisse une crise de la quarantaine alors que nous avons le même âge n'est sans doute pas étranger à ma plongée dans cet univers. C'est vrai que je me reconnais dans John Nolan. Il déconne un peu, s'en fait pour son prochain, nargue son sergent... C'est le PJ idéal. D'autant que Nathan Fillion est parfait dans ce rôle de flic qui veut bien faire et qui est agaçant à force d'optimisme.

Commentaires