École des monstres, de Marc Agapit (1963)


Épisode 5


Numéro 80 de la collection Fantastique / SF / Aventure.



En deux mots

Nous sommes dans une petite ville de province française au tournant des années 50 et 60. Mme Martin se dit pauvre, Mme Martin est avare, Mme Martin s'ennuie, Mme Martin vit seule dans une grande maison à la structure très particulière.

Soudain, ses deux sœurs, perdues de vues depuis vingt ans, refont surface avec une proposition bizarre, mais lucrative...


Pourquoi c'est bien

Vous aimez les films en noir et blanc, avec du brouillard, des ambiances feutrées mais doucement malsaines ? Une larme de grand-guignol sur un fond de Claude Chabrol ? Vous aimerez. Si vous voulez de la logique et une intrigue qui se résout bien proprement à la fin, vous risquez de moins apprécier, mais comme la narratrice est, de base, à moitié branque, même les incohérences sont explicables.

Les petites vieilles dans les campagnes qui comptent tout, font attention à tout et se privent de tout pour mettre trois sous de côté sont intemporelles, y compris quand leur sens de l'économie tourne à la démence, comme c'est le cas de la narratrice, qui se retient à peine de hurler au meurtre quand un invité ose mettre deux morceaux de sucre dans sa tasse de café – « il va me ruiner, le brigand ! »

Vues d'ici, ces « années soixante » ne sont pas doute pas très différentes de nos années vingt préférées, et il y a des morceaux croqués sur le vif qui peuvent être réutilisés tels quels. Je pense notamment une scène où un monsieur de la Poste frappe à la porte de la narratrice pour l'informer qu'elle a reçu un coup de téléphone, et que si elle veut bien venir au bureau pour rappeler... ce qui la panique complètement, car elle n'a jamais passé un coup de fil de sa vie, ne sait pas dans quel bout du combiné on parle, et ainsi de suite.

Si l'on prend un peu de recul, c'est surtout un bon exercice de construction d'ambiance – il se passe des choses, la narratrice ne voit rien, cherche, fouille, comprend un peu et de travers, prend des initiative... bref, d'une manière bizarre, elle investigue sur quelque chose qui se passe dans la propre maison.


Pourquoi c'est lovecraftien

École des monstres n'est n'est pas tellement lovecraftien, à moins de considérer que toutes les histoires de famille malsaines, avec un arrière-plan sexuel louche, sont lovecraftiennes. Lovecraft a tellement donné dans le genre que le rapprochement n'est pas si invraisemblable... ou plutôt, qu'il ne le serait pas si on était dans le fantastique. Là, le lecteur évolue plutôt dans l'étrange, aux confins barrés du polar.


Pourquoi c'est appeldecthulhien

Parce qu'il suffit de modifier très légèrement les paramètres de la fin pour que ça devienne un scénario prêt à servir. Rajoutez une touche d'endoctrinement aux Grands Anciens aux activités des méchants, et hop, le tour est joué !


Bilan

Bricoler un scénario à partir de cette histoire prend... oh, allez, dix minutes chrono. Si vous êtes fatigué. Gardée telle quelle, c'est une bonne histoire sans fantastique, quelque chose qui manque un peu dans les scénarios publiés de L’Appel de Cthulhu. Avec une touche de surnaturel en plus, ça marcherait pareil, voire peut-être mieux.

Ah, et certains aspects m'ont fait penser à Ténèbres au cœur de la montagne, l'un des scénarios de Sous un ciel de sang - c'est bon, mangez-en !


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